
Une aide matérielle et culturelle
C’est entre autres pour regagner son statut de partenaire fiable qu’à l’issue de la Seconde Guerre mondiale, la Suisse fonda et soutint divers programmes d’aides et initiatives de réconciliation. Ceux-ci devaient aider le voisin allemand, terrassé par le conflit, à se remettre sur la voie de la réconciliation et de la reconstruction.
L’économie allemande avait été anéantie par la guerre. Les infrastructures et les immeubles étaient en partie détruits. La population souffrait de la faim, de nombreux produits demeuraient introuvables. Mentalement, beaucoup de personnes souffraient des séquelles laissées par douze années de régime nazi: les partis avaient été interdits, il n’y avait pas de presse libre, les écoles et les universités étaient fermées… La dénazification de l’Allemagne que visaient les Alliés devait passer entre autres par une démilitarisation et une démocratisation totale du pays.
La solidarité avec les populations victimes de la guerre est une vieille tradition suisse, mais elle se doublait ici d’un intérêt politique. Les Alliés s’étaient montrés très critiques envers la neutralité helvétique durant la guerre, d’autant que les entreprises et autorités suisses avaient maintenu des relations d’ordres divers avec l’Allemagne. La Suisse, qui cherchait donc à regagner son statut de partenaire fiable, veillait à ce que son aide ne passe pas inaperçue. Elle mit ainsi au point des programmes de soutien à l’échelle européenne, non dans le cadre de la coopération internationale, par le biais d’organisations internationales d’aide aux réfugiés, mais par ses propres moyens. L’aide devait apparaître comme une contribution suisse décidée en toute souveraineté.
Aide humanitaire
Au début, le «Don suisse» bénéficia surtout à une bonne partie des habitants des régions frontalières allemandes.
L’aide suisse concernait surtout les zones française et britannique, ainsi que Berlin. Le gouvernement militaire américain approvisionnait les populations de sa juridiction de manière largement autonome, tandis que l’occupant soviétique n’acceptait d’aide que de la part du Comité international de la Croix-Rouge, avec lequel l’aide suisse coopérait. Même chose à Berlin, où les alliés soviétiques s’appuyaient sur le droit international pour empêcher une représentation suisse en vertu de l’accord quadripartite: la Croix-Rouge servit de passerelle pour acheminer l’aide alimentaire.
Livres et service de conférences
Sous la direction de l’éditeur et sociologue de la culture Hans Zbinden, un service de conférences fut lancé en 1946, en collaboration étroite avec le ministère des Affaires étrangères. Après de premières expériences positives de conférences données par des intellectuels suisses à un public de prisonniers de guerre allemands détenus dans des camps en Grande-Bretagne, il fut décidé de transposer l’initiative aux zones d’occupation de l’Ouest. Celle-ci remporta un grand succès auprès du public allemand, soumis à une «disette culturelle». En 1948 et 1949, le service envoya 117 intervenants donner près de 1200 cours et conférences dans de nombreuses villes allemandes. Dans ces régions, des professeurs d’université, des journalistes, des hommes politiques, des enseignants, des fonctionnaires et des juristes échangèrent avec la future classe dirigeante allemande sur l’expérience de la démocratie en Suisse et dans l’Allemagne de l’époque, sur le fédéralisme et l’élaboration d’administrations communales.
Échanges et rencontres
Rapprochement de communes allemandes et françaises
Film sur le 70e anniversaire du jumelage entre Ludwigsburg et Montbéliard. Vimeo / Ville de Ludwigsburg
Le centre de rencontre du Réarmement moral à Caux
Le congrès international pour la paix et l’entente entre les peuples à Lörrach
L’idée de la «Regio»: une collaboration trinationale instaurée en 1963 sur le Rhin supérieur
Cette collaboration interrégionale, partie prenante depuis 1963 et aujourd’hui encore de nombreux projets bi- et trinationaux bénéficiant à la population du Rhin supérieur dans des domaines aussi divers que les transports, la science et la culture, a largement contribué à renforcer la cohésion de la région. L’association Regio Basiliensis, en plus d’impulser de nombreux projets, a également pris une part active à la création de divers organes trinationaux, comme la Conférence tripartite, créée en 1975 et devenue depuis la Coopération du Rhin Supérieur, qui relie les autorités gouvernementales et administratives à l’échelon régional et définit le cadre institutionnel de la collaboration transfrontalière. Elle s’est également investie dans la création de l’eurodistrict trinational de Bâle qui regroupe depuis 2007 des communes et des acteurs locaux dans les trois pays. Toutes ces structures permettent des échanges réguliers et l’élaboration de solutions communes. Ce qui apparaît aujourd’hui comme une évidence n’aurait jamais existé sans l’initiative d’individus engagés depuis 1963 en faveur de la paix et de la compréhension entre les peuples de ces trois pays. Dans ce domaine comme dans d’autres, la Suisse a joué un rôle non négligeable en donnant l’impulsion initiale. De nos jours, le modèle de réconciliation et de coopération qu’offre Regio Basiliensis constitue même un exemple dont s’inspirent des délégations venues d’Afrique, d’Asie et du Proche-Orient.






