
L’Entente internationale anticommuniste
L’avocat genevois Théodore Aubert joua un rôle clé dans la création et le développement de l’Entente internationale anticommuniste. Opérant depuis la cité de Calvin, cette organisation entretenait des contacts dans les plus hautes sphères politiques.
La Troisième Internationale
La Troisième Internationale (également appelée Komintern ou Internationale communiste) était un regroupement international de partis communistes. Fondée en 1919 à Moscou, elle visait à diffuser les idées de la révolution d’Octobre dans le monde et à soutenir les gouvernements communistes. Elle fut dissoute en 1943 afin de ne pas nuire à la collaboration entre l’Union soviétique et les Alliés occidentaux contre l’Allemagne au cours de la Seconde Guerre mondiale.
Ce verdict sensationnel et la diffusion rapide de sa plaidoirie dans les médias convainquirent Aubert de se lancer dans une croisade internationale contre le bolchevisme. Il fut soutenu dans ce projet par Georges Lodygensky, ancien délégué du bureau de la Croix-Rouge tsariste.
Ce Bureau s’efforça de mettre en place des cellules de l’EIA dans de nombreux pays européens, le plus souvent en recrutant au sein des groupements civiques et nationalistes existants. S’adressant personnellement à des personnalités de l’élite conservatrice genevoise, Aubert parvint dès 1926 à s’assurer la collaboration du colonel Alfred Odier, qui allait jouer le rôle d’intermédiaire avec l’état-major de l’armée. En moins de dix ans, Théodore Aubert fit entrer dans l’Entente une pléthore de représentants de la droite bourgeoise de toute la Suisse, à l’instar du banquier zurichois Hans de Schulthess, du colonel divisionnaire Guillaume Favre, du conseiller national vaudois Jean de Muralt et, en 1936, le ministre de Suisse à Rome, Georges Wagnière qui intégrait en même temps le CICR.
Un réseau influent
L’EIA tenta également de s’assurer des appuis au Parlement suisse. En 1931, Jean de Muralt constitua un groupe de conseiller nationaux antibolcheviques, dans lequel figuraient notamment les députés vaudois Henri Vallotton et Pierre Rochat. En novembre 1935, Aubert lui-même fut élu au Parlement sur la liste de l’Union nationale, une formation fascisante et antisémite genevoise. À partir de 1929, Aubert entretint des liens étroits avec Jean-Marie Musy, conseiller fédéral et chef du Département des finances et des douanes, avec qui il partageait son aversion pour le régime bolchevique.
L’EIA fut dès lors en mesure de mener de grandes opérations de propagande, notamment dans les Balkans, sous le contrôle du Centre d’Études anticommunistes de Rome, et ce jusqu’aux premières années de la Seconde Guerre mondiale. Durant la guerre d’Espagne, dans laquelle la moitié de la planète fut impliquée entre 1936 et 1939, l’EIA appuya les nationalistes du général Franco. Ses campagnes de propagande présentaient le conflit comme le combat de la civilisation chrétienne contre la barbarie bolchevique.
Son emprise faiblit à l’issue de la Seconde Guerre mondiale, compte tenu non seulement du rôle joué par l’Union soviétique contre l’Allemagne nazie, mais aussi et surtout par la reconnaissance que la Suisse manifesta à l’égard de Moscou. La guerre entraîna par ailleurs de nouveaux équilibres, donnant à la lutte anticommuniste une consonance plus américaine qu’européenne. Théodore Aubert et Georges Lodygensky décidèrent alors de mettre un terme à l’Entente internationale anticommunistes et de léguer tant sa bibliothèque que ses archives à la Bibliothèque publique et universitaire de Genève, non sans avoir pris le soin de trier soigneusement les documents en question.


