
Du charbon et de l’uranium pour la patrie
Pendant la Seconde Guerre mondiale, la Suisse, pays pauvre en matières premières, recherche désespérément des ressources locales. Dans la région bernoise aussi, on creuse, on sonde et on fore.
Or beaucoup de biens, notamment les matières premières, font défaut car la Suisse n’est pas riche en ressources naturelles du sol. Un avis publié dans l’Oberländer Tagblatt du 3 février 1944 illustre très bien les conséquences de cette pénurie sur le quotidien: il rapporte en effet que la tournée de mi-journée du car postal entre Steffisburg et le village d’Heimenschwand ne pourra plus être effectuée que les lundis, mercredis et samedis en raison d’un manque de pneus. Celle de l’après-midi est même totalement interrompue.
De fait, Rutsch repère, lors de ses investigations, une couche carbonée (houille piciforme brillante) dans l’une des hautes parois en poudingue sur la rive de la Rotache. Le site de la découverte est très difficile d’accès, mais une galerie de quelque 8 m de long est percée dans la roche afin de déterminer comment la couche de charbon progresse à l’intérieur du poudingue. Le résultat est décevant, le gisement se révèle trop faible pour permettre une exploitation rentable. Rolf Rutsch rend donc un rapport négatif au «Bureau».
En 1949, le géologue Hermann Vogel, originaire de Bâle, se souvient avoir examiné trois années auparavant des morceaux de charbon qui présentaient une radioactivité élevée pour le compte d’une entreprise minière. Ces derniers provenaient d’un petit ruisseau de Buchholterberg. L’«Ibachgrabe» constitue l’un des nombreux affluents de la Rotache, qui finit par se jeter dans l’Aar après un parcours de 18 kilomètres. Vogel décide donc de se mettre en quête d’autres gisements de charbon et de couches de marne contenant de l’uranium dans la région de Buchholterberg et de les analyser de façon approfondie. Il en trouve à plusieurs endroits. Il s’avère que le charbon s’étend en une fine couche discontinue à partir de la Falkenfluh, située à quelque 1080 mètres d’altitude, jusqu’à la Rotache en passant par Buchholterberg. Dans diverses coupes de terrain, de petits gisements de charbon sortent en saillie du poudingue. Les investigations de Vogel permettent alors de conclure qu’il est tout à fait possible de mesurer la radioactivité dans la roche et le charbon. D’après ses calculs, on peut extraire environ 1,6 kg d’uranium d’une tonne de charbon de l’Ibachgrabe. Mais là encore, la faible quantité de charbon, dispersée sur une grande surface inaccessible, se révèle un trop gros obstacle pour procéder à une telle exploitation.


