Esprit du temps, 1907. Sculpture de Richard Kissling pour l’arche d’entrée de la gare de Lucerne construite en 1896.
Esprit du temps, 1907. Sculpture de Richard Kissling pour l’arche d’entrée de la gare de Lucerne construite en 1896. Juchée sur un bogie, cette allégorie tend un bras résolu vers le futur. Le passé est illustré par les ailes d’Hermès, messager des dieux de la mythologie grecque, protégeant deux ouvriers qui ouvrent la voie. Wikimedia / James Steakley

L’esprit du temps en 1900: promenade à travers Lucerne

À l’aube du XXe siècle, les villes suisses comme Lucerne connaissent un bouleversement historique. Leur cœur moyenâgeux se voit entouré de nouveaux quartiers comprenant bâtiments commerciaux et résidentiels de caractère, gares, offices de poste, bâtiments administratifs, écoles, hôtels et villas: un progrès qui mêle architecture et histoire. Promenons-nous donc à travers Lucerne.

Kurt Messmer

Kurt Messmer

Kurt Messmer travaille comme historien spécialisé dans l’histoire au sein de l’espace public.

C’est la matérialité qui fait la différence. Celle des bâtiments possède sur l’écrit l’avantage de nous captiver par une présence physique. Monumentalité de l’historicisme, sévérité du classicisme, élégance ludique du rococo – quelques exemples suffisent à évoquer d’innombrables formes d’expression. La matérialité permet à plusieurs de nos sens d’appréhender simultanément bâtiments, places et quartiers: une affaire de goûts et d’inclinations, en toute subjectivité. Comment pourrait-il en être autrement? Cela étant, les qualités architectoniques et urbanistiques demeurent toujours au premier plan.

Cathédrales de l’ère industrielle et châteaux historiques

En 1800, il fallait dix-neuf heures à un cocher pour conduire son attelage de Lucerne à Bâle. Un siècle plus tard, un voyageur effectue le même trajet en deux heures et quatre minutes en train. Au début de son activité de parlementaire, Josef Zemp, qui deviendra conseiller fédéral, voyageait en diligence postale d’Entlebuch à Berne, avant de passer au train dès 1875. Ce nouveau moyen de transport des personnes et des marchandises marqua une avancée majeure de notre civilisation.
La gare de Lucerne vers 1900, peu après son achèvement
La gare de Lucerne vers 1900, peu après son achèvement. Difficile d’exprimer l’importance du chemin de fer de façon plus monumentale. Si l’intérieur de la gare accueille les chevaux-vapeur, ceux bien réels des fiacres parqués sur la place mèneront les voyageurs vers leur hôtel. hephaestus.ch
Étape suivante, l’électrification. Si le train incarne l’avenir, le bâtiment de la gare demeure le reflet du passé. Un dôme, une cathédrale. L’imposante coupole culmine à plus de quarante mètres et adresse un salut grandiose aux hôtels situés sur la rive opposée du lac. Cela n’est pas du goût de tous: d’aucuns vouent aux gémonies cette coupole, élément architectural le plus sacré traditionnellement réservé aux églises. Cela n’empêche pas le solennel et le sacré de s’allier au progrès technique. La voûte baroque de la gare de Lucerne s’appuie sur une armature en acier, innovation qui sera présentée à Paris lors de l’exposition universelle de 1900.
Halle des fêtes, spécialement construite pour la fête fédérale de tir de 1901 à Lucerne.
Halle des fêtes, spécialement construite pour la fête fédérale de tir de 1901 à Lucerne. Cette reproduction d’un château moyenâgeux, installée à l’endroit le mieux situé de la ville, abritera par la suite le musée international de la guerre et de la paix. Comme par hasard, cette carte postale montre le réapprovisionnement du bateau à vapeur Winkelried. Et personne ne s’étonnera qu’un tireur d’élite comme Guillaume Tell reçoive ses pairs à Lucerne. ETH Bibliothek Zurich
En 1901, la Ville de Lucerne se surpasse à l’occasion de la fête fédérale du tir. La halle des fêtes mesure 115 mètres de long, 50 mètres de large, 18 mètres de haut et peut accueillir 4500 personnes. Si ses trois nefs évoquent l’architecture basilicale, elles ne sont pas l’œuvre de bâtisseurs du Moyen Âge. L’architecte Hans Siegwart invente une poutre en béton qui portera le toit de la halle, puis le nom de son créateur – une prouesse technique d’avant-garde. Les matériaux les plus modernes seront aussi utilisés pour les murs. En 1901, on peut lire dans le journal suisse de la construction: «Des essais approfondis débouchèrent sur la fabrication de plaques en ciment armé, semblables à une maçonnerie de grès gris altérée par le temps. Des plantes grimpantes de toutes sortes envahirent les murs, des mousses se développèrent sur les créneaux et les parties ombragées du toit». Quand le béton armé se pare des atours du Moyen Âge.
Prototype au format villa. Deux ans avant la construction de la halle des fêtes pour la fête fédérale du tir de Lucerne en 1901, Hans Siegwart construit à la Reckenbühlstrasse 2, pour son frère le sculpteur Hugo Siegwart, la maison-atelier Farnburg, exemplaire de la tendance au romantisme médiéval de l’époque.
Prototype au format villa. Deux ans avant la construction de la halle des fêtes pour la fête fédérale du tir de Lucerne en 1901, Hans Siegwart construit à la Reckenbühlstrasse 2, pour son frère le sculpteur Hugo Siegwart, la maison-atelier Farnburg, exemplaire de la tendance au romantisme médiéval de l’époque. Kurt Messmer
Halles des fêtes et villas type château pourraient ne représenter que de merveilleuses exceptions, mais il n’en est rien. Vers 1900, associer romantisme et inspiration historique était usuel.

Villes nouvelles et signatures anciennes

Wilhelm Keller accomplit un apprentissage de maçon dans l’entreprise de son père, dans la vallée lucernoise du Seetal. Il apprend ensuite le dessin chez un architecte de sa parenté, fonde une entreprise de construction, puis s’établit à Lucerne en 1865. Dès l’année suivante, il entame la construction d’un groupe d’immeubles résidentiels et commerciaux sur la Pilatusstrasse, artère principale de Lucerne. La construction en trois étapes de cet ensemble monumental s’achèvera en 1884.
Château dans la ville nouvelle de Lucerne, le Kellerhof est éponyme de son constructeur, Wilhelm Keller.
Château dans la ville nouvelle de Lucerne, le Kellerhof est éponyme de son constructeur, Wilhelm Keller. Ce bâtiment d’inspiration néogothique est le siège social de l’entrepreneur, architecte et maître d’œuvre dont la productivité éclatante n’eut d’égale que la réussite, et qui inspirera le terme Kellergotik (gothique à la Keller). Carte postale des alentours de 1900, photographe inconnu. hirschmatt-neustadt.ch
La liste des réalisations de Keller donne le tournis: construction de plus de 40 églises et chapelles, plus de 90 extensions, 34 écoles, 19 hôtels ou auberges, ainsi que plusieurs centaines de maisons familiales aussi bien en ville qu’à la campagne. En 1866, le Kellerhof marque le début d’une urbanisation galopante. En 1800, Lucerne ne comptait que 4500 habitants environ. En 1850, ils seront 10 000, chiffre multiplié par deux en 1890. De 1890 à 1910, cette population doublera encore pour atteindre les 40 000 habitants. La ville a besoin d’espace. On le crée en développant une ville nouvelle selon un plan orthogonal. Il en résulte une diversité dont le dénominateur commun est la qualité, que l’on observe aujourd’hui encore à l’occasion d’une flânerie entre la gare et les hauts de la ville.
Plan orthogonal typique de la ville nouvelle de Lucerne en 1910: carrés d’immeubles mitoyens entourant une cour collective et dont les façades extérieures donnent sur la rue toute proche.
Plan orthogonal typique de la ville nouvelle de Lucerne en 1910: carrés d’immeubles mitoyens entourant une cour collective et dont les façades extérieures donnent sur la rue toute proche. Kantonale Denkmalpflege Luzern / illustration Kurt Messmer
Si l’essor de la ville nouvelle ne connaît pas d’équivalent, le nom de ses rues reflète un retour vers le passé. La Frankenstrasse évoque l’empire de Charlemagne. La Murbacherstrasse et la Habsburgerstrasse rappellent la vente des droits sur Lucerne par l’Abbaye de Murbach aux Habsbourg. La Waldstätterstrasse marque en quelque sorte la fin de la période pré-confédérale. Les rues des quartiers portent les noms de batailles glorieuses – Morgarten 1315, Sempach 1386, Dornach 1499, guerre de Souabe –, mais aussi d’un héros national, Winkelried. Non loin de la ville nouvelle, dans l’église des Franciscains restaurée vers 1900, la fresque représentant les étendards conquis depuis la bataille de Sempach fait de ce lieu de culte une sorte de Panthéon.
Mur gauche de la nef centrale de l’église des Franciscains à Lucerne. On peut y contempler les étendards conquis à l’occasion des batailles victorieuses menées par les confédérés, repeints après 1622.
Mur gauche de la nef centrale de l’église des Franciscains à Lucerne. On peut y contempler les étendards conquis à l’occasion des batailles victorieuses menées par les confédérés, repeints après 1622. Dany Schulthess
Perspective et rétrospective vont de pair: plus le rythme du progrès s’accélère, plus se fait ressentir le besoin de se tourner vers le passé et son histoire.

Manifes­ta­tions du sacré

Après 1850, on assiste à une résurgence de styles architecturaux et artistiques que l’on dénommera historicisme. Il ne s’agissait pas d’imiter fidèlement des styles donnés. La libre interprétation de toute l’histoire de la construction doit bien davantage déboucher sur un style propre répondant aux aspirations de la bourgeoisie cultivée du XIXe siècle.
de gauche: Église paroissiale de Schötz LU, Église paroissiale de Grosswangen LU, Église paroissiale de Eschenbach LU
Trois exemples parmi tant d’autres, de gauche à droite: Église paroissiale de Schötz (LU), d’inspiration romane mais construite des siècles après 1100, en 1879 / Église paroissiale de Grosswangen (LU) néogothique, inspirée du style Kellergotik, construite non pas vers 1400 mais en 1867 / Église paroissiale d’Eschenbach (LU) néobaroque, construite bien après 1700, en 1912. Wikimedia / A6 Architekten / Wikimedia
L’historicisme se manifeste de façon particulièrement prégnante à une époque qui voit fleurir la construction d’édifices religieux. Il répond au besoin des jeunes états-nations de retrouver leurs racines.

Quand le passé se conjugue au présent

Dans sa seconde moitié, le XIXe siècle est marqué par une course à la technique riche en triomphes successifs. Rigi: premier chemin de fer à crémaillère d’Europe, 1871. Gothard: plus long tunnel ferroviaire du monde, 1882. Pilate: chemin de fer à crémaillère le plus raide du monde, 1889. Ingénieurs et curieux de toute l’Europe accourent en pèlerinage à la centrale électrique de Thorenberg, dans la banlieue de Lucerne. Cette infrastructure de courant alternatif fait de Lucerne la première ville de Suisse à disposer, dès 1886, d’une centrale électrique fournissant de l’énergie à son réseau de distribution au moyen d’une ligne longue distance de six kilomètres. L’un de ses premiers clients sera l’hôtel Schweizerhof situé sur les quais de Lucerne. Cette promenade très appréciée est désormais éclairée à l’électricité, pour mieux voir et mieux être vu. Dans les hôtels, on téléphone déjà. En 1883, Lucerne ne compte que 61 abonnés au téléphone, contre 1026 en 1900. Autre étape de la civilisation, le passage de la cruche au robinet. En 1876, seuls 53% des ménages de Lucerne sont raccordés à l’eau courante. Vingt-quatre ans seulement suffiront pour que ces proportions atteignent 93% en 1900.
Tandis que technique et civilisation avancent à marche forcée, la construction hôtelière donne dans le romantisme. Construit en 1888, l’hôtel Château Gütsch à Lucerne trouvera sa forme actuelle en 1901.
Tandis que technique et civilisation avancent à marche forcée, la construction hôtelière donne dans le romantisme. Construit en 1888, l’hôtel Château Gütsch à Lucerne trouvera sa forme actuelle en 1901. Wikimedia / Bohao Zhao
D’un côté les inventeurs, techniciens et pionniers tournés vers l’avenir et de l’autre des maîtres d’œuvre et architectes rétrogrades? La différence n’est pas aussi univoque pour l’hôtel éponyme de la colline du Gütsch surplombant Lucerne. Ici et là, le bâtiment cache bien son jeu. Ainsi, la tour principale que l’on suppose en pierre de taille est en réalité une charpente de bois recouverte de tôle blanche. L’architecte Emil Vogt s’est inspiré du château romantique de Louis II de Bavière à Neuschwanstein. Mais attention, cette construction fait appel à des matériaux modernes. Des piliers en fonte, par exemple. Ce que Vogt accomplit ici sur le plan architectural est une véritable démonstration de force. L’élégance aérienne de la tour principale, des toits et des tours d’angle est un modèle de virtuosité. Le raffinement de la juxtaposition des deux vérandas et leur intégration au corps principal du bâtiment, la discrétion des ornements de la façade, inspirés de la renaissance italienne et du classicisme: autant d’éléments qui témoignent du talent d’un architecte dont la carrière sera internationale, avant tout dans la construction hôtelière, de Kriens au Caire.

Les indices d’un idéal – type

Évoquer la ville moyenâgeuse suscite les mêmes images chez de nombreuses personnes: remparts, tours, portes, hôtel de ville, place du marché, fontaines, ruelles, etc. Il n’y a pas de ville moyenâgeuse type, mais ses innombrables variations peuvent être condensées en un archétype imaginaire. Il en va de même pour les immeubles résidentiels et commerciaux à l’aube du XXe siècle: le Gutenberghof, notamment, se révèle emblématique d’un style valant largement le détour.
Quand les histoires se mêlent à l’histoire. Le Gutenberghof sur la Frankenstrasse: idéal-type intact de l’immeuble résidentiel et commercial. Construit en 1906 pour l’imprimerie Raeber, son nom rend hommage à l’inventeur de l’imprimerie en Occident.
Quand les histoires se mêlent à l’histoire. Le Gutenberghof sur la Frankenstrasse: idéal-type intact de l’immeuble résidentiel et commercial. Construit en 1906 pour l’imprimerie Raeber, son nom rend hommage à l’inventeur de l’imprimerie en Occident. Kurt Messmer
Les fonctions premières du bâtiment apparaissent clairement sur sa façade. Les deux premiers étages sont bardés de pierre naturelle et abritent des locaux commerciaux. Les trois étages supérieurs sont recouverts d’un crépi clair. Le pluralisme stylistique est ici pleinement exploité. Chaque étage est percé de fenêtres aux formes différentes. Les balcons de pierre et leurs élégantes balustrades en fer forgé déclinent un riche répertoire architectural. Plusieurs étages sont pourvus d’encorbellements et couronnés de petites corniches mettant en valeur une tour centrale triomphante. Et comme si cela ne suffisait pas: deux figures historiques presque grandeur nature et d’autres sculptures inspirées par l’art de l’imprimerie, ainsi que des armoiries. Difficile de trouver façade historique plus dense.

Carte de visite architecturale

Lorsque le Gotthardgebäude est achevé en 1889 sur le Schweizerhofquai, la ligne du Gothard ne dessert pas encore Lucerne. Le tronçon Immensee – Lucerne ne sera inauguré qu’en 1897. On est impressionné au premier regard par les caractéristiques urbanistiques et architecturales de cet imposant bâtiment administratif.
Immeuble administratif de la Société des chemins de fer du Gothard, construit en 1889
Ce cliché montre l’immeuble administratif de la Société des chemins de fer du Gothard, construit en 1889, exemplaire de ce que la représentativité pouvait signifier à la fin du XIXe siècle. Il abrite aujourd’hui la troisième et la quatrième cour de droit public du Tribunal fédéral. Wikimedia / SBB Historic
Trois étages surmontent un rez-de-chaussée en pierre de taille. La façade de ce bâtiment colossal est structurée en trois avant-corps. Contrairement aux deux autres, celui du centre compte trois alignements verticaux de fenêtres et un étage de plus, qui vient renforcer le caractère palatial de l’ensemble. D’imposantes colonnes corinthiennes s’élèvent sur deux étages. Elles accentuent ainsi une verticalité qui équilibre la force des éléments horizontaux. Au premier étage, la décoration des fenêtres est particulièrement riche. Au-dessus des linteaux, les corniches sont surmontées de têtes sculptées. Entre les colonnes, elles alternent arcs et triangles. Que de soin, que de classe! Pas étonnant qu’il en soit de même pour les allégories qui enrichissent la façade de l’avant-corps central, dont les colonnes soutiennent un piédestal en corniche surmonté d’un personnage féminin. Chacune de ces sculptures illustre un pilier du progrès technique. Au pied des avant-corps latéraux, deux femmes et deux hommes représentent les quatre fleuves alpins: Rhin, Reuss, Tessin et Rhône.
Bâtiment du Gothard à Lucerne.
Bâtiment du Gothard à Lucerne. Quatre allégories reconnaissables à leurs attributs: l’ingénierie s’appuie sur une règle à calcul, l’architecture porte un compas, la mécanique arbore une roue et l’électrotechnique tient une poignée d’éclairs. Si l’on a fait ici appel aux femmes pour des raisons de représentation, on ne trouve à l’époque pas d’ingénieures, de femmes architectes ou de techniciennes. Kurt Messmer
Le bâtiment du Gothard de l’architecte Gustav Mossdorf est la figure de proue du style néo-renaissance dans le canton de Lucerne. Exemplaire d’une volonté et d’une puissance créatrice sans pareilles, il s’agit d’un fleuron parmi les nombreux bâtiments remarquables érigés vers 1900.

Où de grands maîtres prêchent le sérieux

Impossible de ne pas déceler une parenté architecturale entre la Sälischulhaus et le Gotthardgebäude. Même structure: rez-de-chaussée, avant-corps central marqués entre deux avant-corps proéminents. L’entrée principale mesure un étage et demi. Ornées de la croix suisse, ses portes sont si lourdes que les écoliers de première année ne parviennent pas à ouvrir ce portail du savoir sans se faire aider. Sous l’avant-toit, les soffites qui font le tour du bâtiment sont ornés des armoiries de tous les cantons, comme pour mettre en valeur le fédéralisme de l’enseignement dans ce canton de Lucerne qui fit partie du Sonderbund. Outre les peintures décoratives, on y remarque toute l’élite intellectuelle de l’époque contemplant les écoliers de haut, peut-être même d’un peu trop haut. Il y a là tout le gratin des grands maîtres. Des hommes et rien que des hommes. Il serait faux d’encenser la Belle Époque. Au cours des trente-quatre ans séparant 1882 de 1914, l’armée suisse interviendra trente-neuf fois dans son propre pays pour mater manifestants et grévistes.
La Sälischulhaus à Lucerne.
La Sälischulhaus à Lucerne. Cette école incarnant l’esprit du temps fut construite en 1898 à la suite d’un concours ouvert aux architectes de tout le pays. Kurt Messmer
«Apprends à vivre et vis pour apprendre». Cette maxime immortalisée en majuscules dorées au-dessus de l’entrée principale de la Sälischulhaus nous interroge, sous les regards protecteurs de Pestalozzi et d’Eduard Pfyffer, libéral éclairé et politicien lucernois de premier plan dans le domaine de l’éducation. Dans les rinceaux stylisés des lucarnes, deux autres devises: Diligens officii et Nulla dies sine linea (Les joies du devoir et Pas un jour sans écrire) Le sermon est impérieux, il respire la discipline. Ainsi s’inscrit l’enseignement dans la société, aux alentours de 1900.

D’autres regards

Notre balade s’achève sur un double plaidoyer. D’abord, et en particulier, pour la maîtrise d’un art consistant à s’inspirer du langage formel d’époques révolues pour en tirer de nouvelles créations qui, dans le meilleur des cas, résistent à toute comparaison. Ensuite, d’une manière générale, pour le fait d’y regarder à deux fois, car comme le montre l’architecture du XXe siècle naissant, le premier regard ne doit jamais être le dernier.

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