Histoire d’un chant de Noël
Il y a plus de 200 ans, Douce nuit, sainte nuit était chanté pour la première fois. Grâce à son message touchant et à sa mélodie facile à retenir, ce chant de Noël est devenu l’un des plus appréciés partout dans le monde.
Oberndorf, un village enneigé au pied des Alpes autrichiennes dans la région de Salzbourg: les habitants se sont réunis dans l’église Saint-Nicolas pour la messe de Noël en ce 24 décembre de l’année 1818. Comme il n’est pas possible d’utiliser l’orgue, le prêtre auxiliaire et l’instituteur du village ont spécialement composé une chanson qui peut s’accompagner à la guitare. Le nouveau chant rappelle une berceuse, tant par sa mélodie que par son texte qui décrit l’Enfant Jésus dormant profondément. C’est ainsi que les fidèles entendent pour la première fois les douces tonalités du chant de Noël Douce nuit, sainte nuit. Ils ne se doutent pas du succès qu’il aura durant les deux siècles à venir.
Mais les personnes présentes ont certainement été conquises. En quelques années, ce chant s’est propagé d’Oberndorf à toute l’Autriche et même au monde entier. En 2011, l’UNESCO l’a reconnu comme un bien culturel immatériel. Ce succès tient notamment à sa mélodie simple composée par l’instituteur du village et organiste Franz Xaver Gruber (1787-1863). La mesure 6/8 typique des berceuses a un effet apaisant sur ceux qui l’écoutent et dégage une atmosphère propice à la méditation. Le texte, à l’origine écrit comme un poème par le prêtre auxiliaire Joseph Mohr (1792-1848), facile à retenir et neutre sur le plan confessionnel, a lui aussi largement contribué à ce succès.
Les deux hommes ont créé un chant qui réconforte les gens dans les moments difficiles et leur donne de l’espoir. En 1818, les effets de «l’année sans été» se font encore sentir dans les Préalpes. En 1815, l’éruption d’un volcan indonésien a provoqué une modification du climat en Europe, entraînant des mauvaises récoltes. Sans oublier les guerres, les pillages et le tracé arbitraire des frontières par le Congrès de Vienne, littéralement à la porte d’Oberndorf, qui compliqua considérablement la vie des gens. Joseph Mohr et Franz Xaver Gruber avaient trouvé le ton juste pour leur chant dont le message était compréhensible par tous. Ce message a non seulement plu aux fidèles présents lors de sa première interprétation, mais aussi aux milliards de personnes qui ont chanté et chantent aujourd’hui encore ce chant lors de la messe de minuit ou devant le sapin de Noël.
La trêve de Noël de 1914
Presque 100 ans après la création de Douce nuit, sainte nuit, quelque chose de tout aussi extraordinaire et d’émouvant s’est passé dans les Flandres la veille de Noël 1914. Le chant de Noël autrichien y a joué un rôle important. La Première Guerre mondiale s’enlisait dans les tranchées autour d’Ypres, les hommes des deux camps étaient assis dans la boue alors que leurs camarades morts gisaient dans le no man’s land entre les positions. Noël semblait bien loin. Et pourtant, en cette nuit étoilée, la magie de Noël a surgi parmi les combattants.
Difficile de savoir avec certitude où la trêve de Noël a commencé. Des témoins de l’événement rapportent que des bougies et des sapins de Noël ont été allumés près des tranchées. Les belligérants étaient si proches les uns des autres qu’ils pouvaient se parler. C’est ainsi qu’une trêve spontanée a eu lieu. Les Allemands et les Anglais se sont extirpés de leurs tranchées, se sont tendu la main et ont chanté des chants de Noël ensemble. Outre les chants allemands et anglais, Douce nuit, sainte nuit a bien sûr aussi retenti sur le champ de bataille envahi d’un calme fantomatique.
Même si la trêve de Noël n’a pas duré longtemps, le message de paix lancé en 1818 par Joseph Mohr et Franz Xaver Gruber a atteint les gens jusqu’aux tranchées d’une guerre sans merci, pendant quelques heures. Et aujourd’hui encore, partout dans le monde, Douce nuit, sainte nuit est chanté dans d’innombrables langues.