En 1936, le Conseil fédéral recommanda de peindre en jaune les passages pour piétons, s’inspirant ainsi des chemins de randonnée également marqués en jaune. Illustration: Marco Heer.
En 1936, le Conseil fédéral recommanda de peindre en jaune les passages pour piétons, s’inspirant ainsi des chemins de randonnée également marqués en jaune. Illustration: Marco Heer.

Le premier passage pour piétons

Si, de nos jours, les piétons ont presque toujours la priorité, il n’en a pas toujours été ainsi. Depuis le premier passage zébré à Bâle en 1948, leur sécurité n’a cessé d’être renforcée.

Andrej Abplanalp

Andrej Abplanalp

Historien et chef de la communication du Musée national suisse.

Pendant des siècles, l’humanité s’est organisée sur les voies de circulation. Tout se passait relativement bien jusqu’à l’invention d’un nouveau véhicule: l’automobile. Dès lors, l’équilibre fut rompu et impossible à rétablir. Les premiers touchés furent les piétons les plus vulnérables. Traverser les routes était particulièrement dangereux et les premiers marquages furent donc envisagés dès les années 1930. À l’aide de panneaux, de clous sur la route ou de marquages, on tenta d’orienter les «piétons» vers les endroits appropriés pour traverser les chaussées. Il est intéressant de noter que ces efforts visaient davantage à éduquer les piétons qu’à les protéger.
Exemples de passages piétons dans un courrier du Bureau de prévention des accidents, 1952.
Exemples de passages piétons dans un courrier du Bureau de prévention des accidents, 1952. Archives fédérales suisses
En 1936, le Conseil fédéral recommanda de peindre en jaune les passages pour piétons sur les chaussées, s’inspirant ainsi des chemins de randonnée qui utilisaient également la couleur jaune depuis 1934. En revanche, il ne définit pas leur apparence et ne mena pas non plus de long débat sur la question de la priorité. La loi de 1932 s’appliquait:

Le piéton doit pouvoir traverser la chaussée sans encombre lorsqu’il s’y est engagé assez tôt pour qu’il soit encore possible au conduc­teur qui s’approche, de lui accorder la priorité sans mettre personne en danger.

Loi fédérale sur la circulation des véhicules automobiles et des cycles de 1932
L’apparence des passages pour piétons enflamma l’imagination des membres de l’Association suisse des professionnels de la route et des transports (VSS). Les planificateurs des transports de la VSS testèrent de nombreuses variantes et formulèrent d’innombrables suggestions, lesquelles intégraient souvent des considérations d’ordre psychologique.
Passage pour piétons
Les rayures devaient diriger les piétons vers le côté droit. Archives fédérales suisses
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Passage pour piétons
Trafic piétonnier au centre. Archives fédérales suisses
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Passage pour piétons
Chaque chose à sa place. Un passage piéton à double sens... Archives fédérales suisses
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Passage pour piétons
Un motif censé améliorer la visibilité, également pour les automobilistes. Archives fédérales suisses
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Passage pour piétons
Des motifs en dents de scie également pour une meilleure visibilité. Archives fédérales suisses
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Passage pour piétons
Un îlot de protection pour les chaussées à trois voies. Archives fédérales suisses
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Malgré ce zèle, traverser une route dans les années 1940 et 1950 restait une aventure périlleuse, en raison notamment du manque de visibilité des passages à de nombreux endroits et de l’hétérogénéité de leur apparence. Les passages pour piétons, tels que nous les connaissons aujourd’hui, ne sont apparus qu’à la fin des années 1940. C’est Bâle qui donna le coup d’envoi en 1948. L’Automobil Revue célébra le «passage piéton zébré» jaune comme un succès car «les piétons respectent bien plus les passages qui leur sont assignés».
Article sur le premier «passage piéton zébré» en Suisse dans l'Automobil Revue, 1948.
Article sur le premier «passage piéton zébré» en Suisse dans l'Automobil Revue, 1948. Archives fédérales suisses
Des élèves s'entraînant à traverser la route, 1952.
Des élèves s'entraînant à traverser la route, 1952. Musée national suisse / ASL
Quelques mois auparavant, Die Tat, le journal de la Migros se moquait des passages pour piétons à Paris: «À côté de diverses modes extravagantes, Paris s’est également offert le dernier cri des passages pour piétons.» On pouvait varier un peu en peignant des passages piétons zébrés. Malgré les moqueries et les railleries, le passage piéton s’imposa et lorsqu’en 1962, la priorité accordée aux piétons fut également ancrée dans la loi, il ne fut définitivement plus considéré comme un phénomène de mode.

La première fois…

Il y a une première fois à tout. Cette série met à l’honneur les premières historiques de la Suisse et aborde des thèmes aussi variés que les premiers passages piétons et la toute première initiative populaire. Les articles sont rédigés en collaboration avec les Archives fédérales suisses.

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