
Vieux-Brisach – Un point focal de l’histoire européenne
À mi-chemin entre Fribourg-en-Brisgau et Colmar, la ville badoise de Vieux-Brisach (ou Breisach am Rhein en allemand) domine la plaine du Rhin sur la colline du Münsterberg. La situation avantageuse de la ville est étroitement liée à l’histoire mouvementée d’une région au cœur de l’Europe.
Les Romains sur le Rhin
Indices d’une rupture civilisationnelle
La cathédrale, manifestation de la domination chrétienne
L’influence chrétienne est particulièrement manifeste dans les églises bâties à cette époque. Vieux-Brisach dispose probablement d’une église dès l’époque carolingienne. La première pierre de l’actuelle cathédrale est posée vers 1185 sur les fondations de l’ancien camp fortifié romain. Au XIIe siècle, on dispose d’ailleurs encore de matériaux de construction datant de l’ère romaine. Les conditions sont optimales.
Une cathédrale ne se bâtit cependant pas en un jour. Celle de Vieux-Brisach est le fruit de trois siècles de travaux. Au Moyen Âge, ces projets sont l’œuvre de générations.
L’une des forteresses les plus redoutables en Europe
Neuf-Brisach: du neuf à partir de rien
Entre le marteau et l’enclume
Retournement de situation. Dans un contexte de tensions persistantes avec la France, l’impératrice Marie-Thérèse d’Autriche veut éviter qu’un important bastion ne tombe en mains ennemies. Pendant des siècles, les défenses de Vieux-Brisach avaient été renforcées sans regarder à la dépense. En 1741, elles sont entièrement démantelées à titre préventif. Ne reste plus qu’une ville rurale insignifiante. Vieux-Brisach est promptement reconquise par les Français en 1744, sans rencontrer la moindre résistance. Ils se retirent néanmoins au bout d’un an et demi seulement. Un feu de paille.
La population de Vieux-Brisach connaît la tranquillité pendant le demi-siècle qui suit. Éclate alors la Révolution française. On parle d’abord de «troubles», mais une véritable tempête politique finit par s’étendre à toute l’Europe. La Prusse et l’Autriche s’allient contre la France lors de la guerre de la première coalition. En 1793, Vieux-Brisach est conquise par les troupes françaises. Une fois de plus. Elle est totalement détruite pour la peine.
Vers 6 heures hier soir, des bombes et boulets incandescents se sont abattus sur Vieux-Brisach. En moins d’une demi-heure, toute la ville était en flammes. L’incendie dura toute la nuit. On prévoyait aujourd’hui de jeter un pont de bateaux sur le Rhin pour envahir le Brisgau.
Fin du statut de ville frontière
À nouveau une ville frontière, mais démilitarisée
L’armistice donne 15 jours aux Allemands pour se retirer d’Alsace et de Lorraine. Nombre de troupes allemandes traversent le Rhin au niveau de Vieux-Brisach. La défaite est évidente, les perspectives sinistres.
Vieux-Brisach, reflet de l’Allemagne
Sur le plan militaire, la ville n’est pas menacée directement jusqu’à l’été 1944. Tout change avec l’avancée des forces alliées et la retraite des troupes allemandes. La «Volkssturm» est mobilisée: tous les hommes entre 14 et 60 ans doivent se présenter pour le service. La population civile est évacuée plusieurs fois, Vieux-Brisach est bombardée à près de 130 reprises.


En route pour l’Europe!
Êtes-vous favorable à la suppression des frontières politiques et économiques au sein de l’Europe et à l’union de tous les peuples européens au sein d’un État fédéral européen? Oui / Non
Bilan
Vieux-Brisach illustre parfaitement la manière dont l’histoire est influencée par la géographie. Cela ne signifie pas pour autant que le destin de la ville était tout tracé. Un si géographique n’est pas forcément suivi par un alors historique. L’histoire ne se laisse pas faire, elle n’a rien de mécanique, n’a pas de logique.
Individuel et collectif
L’être humain est individuel, mais il serait perdu sans communauté. Des collectifs apparaissent sans cesse dans l’histoire: les Romains, les Germains, les Allemands, les Français... Rappelons-nous toutefois d’Albert Ziehler qui, en 1945, avance seul vers la colonne de chars français avec un drapeau blanc. Les collectifs impressionnent, les individus émeuvent.
Constat et conclusion
Les humains tirent-ils des leçons de l’histoire? Bien sûr que oui. Sinon comment 96% de la population de Vieux-Brisach aurait-elle pu s’exprimer en faveur d’un État fédéral européen, quelques années seulement après la Seconde Guerre mondiale? Comment expliquer autrement l’amitié franco-allemande qui lie Vieux-Brisach et Neuf-Brisach, après trois conflits entre l’Allemagne et la France en 70 ans (1870, 1914, 1940)? Qui sont toutefois les humains? Cela signifie-t-il que tout le monde, humains, communautés et gouvernements tirent les leçons de l’histoire partout et tout le temps? Le monde serait bien différent. Il n’y a pas de réponse toute prête à la question «l’histoire est-elle la maîtresse de la vie?» tant celle-ci compte de cas particuliers. En 1951, six ans seulement après la fin de la terrible Seconde Guerre mondiale, la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg, la France, l’Allemagne et l’Italie, anciens ennemis, fondent la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA). Elle crée les bases de l’actuelle Union Européenne, fondée sur les droits de l’homme. La paix constitue sa plus grande réalisation.


